jeudi 29 avril 2010

10 - Cioran, un usage possible.


Il faut toujours avoir un livre de Cioran à portée de main, chose très utile et très nécessaire !... Surtout quand on a besoin d'un endroit où poser son pain au raisins. - Ou comment même le foyer du pessimisme le plus profond peut à sa manière servir de support à certains menus plaisirs. Qui a dit que le pessimisme contrariait la digestion ?

9 - Touche romantique.


Il me vient la folle envie de teinter mon blog d'une touche de romantisme. Je proclame donc haut et fort que je suis un grand incompris ! Romantisme facile et qui, quand on y réfléchit, ne s'aventure pas très loin, car qui peut se vanter d'être bien compris ? En toute rigueur, peut-on même affirmer que l'on se comprend toujours parfaitement soi-même ? Pour ma part, j'ai toujours pris un grand plaisir à la réponse que Jacques adresse à son maître quand ce dernier lui demande, avec une naïveté confondante, de dire - à propos d'une anecdote quelconque - "la chose comme elle est" : " JACQUES - Cela n'est pas aisé. N'a-t-on pas son caractère, son intérêt, son goût, ses passions, d'après quoi l'on exagère ou l'on atténue ? Dis la chose comme elle est !... Cela n'arrive peut-être pas deux fois en un jour dans toute une grande ville. Et celui qui vous écoute est-il mieux disposé que celui qui parle ? Non. D'où il doit arriver que deux fois à peine en un jour, dans toute une grande ville on soit entendu comme on dit." (Diderot, Jacques le Fataliste, Paris, Livre de Poche, 2000, p. 101). Tout compte fait, mon romantisme ne tourne-t-il pas un peu à... autre chose ?

8 - Crépuscule d'une Idole.


Sous ce titre - qui nous invite fortement à l'identifier à Nietzsche himself - Michel Onfray, ce zorro des temps modernes, prétend dessiller nos yeux aveuglés sur l'une des plus importantes idoles contemporaines - selon lui : Sigmund Freud. Avouons qu'il y a longtemps que la légende dorée freudienne ne dupe plus les perspicaces. Je n'ai certes pas lu ce livre - il y a quand même mieux à faire que de lire les dix livres que Michel Onfray publie chaque année (je n'en ai déjà que trop lus !) - mais je ne me suis pas dispensé d'écouter avec attention et intérêt les - trop - nombreuses interventions télévisées du très anti-parisien et très marginal Michel Onfray : ce qui m'est alors très clairement apparu, c'est que s'il y a une idole moderne dont il serait souhaitable que nous nous débarrassions urgemment, c'est bien plutôt de Michel Onfray lui-même.

7 - Mon pastiche et ses raisons.


Je le revendique d'emblée, afin de ne pas susciter la trop facile illusion de m'avoir démasqué (
malgré moi) : le style de ce blog est un mauvais pastiche de la Belle Humeur et des aphorismes nietzschéens. Pastiche assumé. La raison de ce choix ? L'aphorisme est une forme qui donne à penser, le style nietzschéen est plein de force et de gaieté, mais surtout, Nietzsche avait 24 ans lorsqu'il fit paraître la Naissance de la Tragédie ; comme j'ai moi aussi 24 ans, c'est tout naturellement que je me suis dit : Ecce Homo ! voilà qui il faut imiter !... Mais peut-être ne suis-je pas tout à fait honnête.

6 - Mon ironie.


Affirmer avec force, comme s'il s'agissait de la Vérité même, des perspectives... parfois bouffonnes. - Mon ironie par rapport à la Vérité.

5 - Ma formule.


Sans complexe, sans ordre, sans preuve, sans justification, sans mauvaise conscience, sans fausse humilité et avec un certain narcissisme joyeux et une pointe de cruauté... mais aussi sans sérieux, sans dogmatisme et sans prétention.

4 - Affinités électives.


Quand on parle de Maupassant... : "
Je ne vois absolument pas dans quel siècle de l'histoire on pourrait ramener à la fois dans ses filets des psychologues aussi curieux que délicats, que dans le Paris d'aujourd'hui : [...] pour en faire ressortir un de la race forte, un vrai Latin auquel je suis particulièrement attaché, Guy de Maupassant. " (Nietzsche, Ecce Homo , "Pourquoi je suis si avisé", paragraphe 3 - traduction d'Eric Blondel). Que Nietzsche voit en Maupassant un psychologue "aussi curieux que délicat", voilà qui suffit à prouver qu'il ne faut jamais se fier trop aveuglément aux avis d'un autre, fût-il aussi génial que Nietzsche. Sans doute ce que Nietzsche aimait en Maupassant, c'est une certaine conception, si "délicate" - nous dirions plutôt réductrice - de la "nature" féminine, que les deux auteurs semblent partager dans une certaine mesure. - C'est du moins mon impression, quand je lis, quelques pages plus loin : "Le combat pour l'égalité des droits est [...] un symptôme morbide [...] Plus la femme est femme, plus elle se défend avec bec et ongles contre les droits en tant que tels : l'état de nature, l'éternelle guerre entre les sexes, lui confère, et de loin, la première place." (Nietzsche, op. cit. "Pourquoi j'écris de si bons livres", paragraphe 5). Que l'on daigne comparer ces propos à ce que je disais plus haut de la "lucidité" présente dans Bel-Ami (2).

3 - Mon courage.


J'ai le courage de mes opinions jusque dans mes aveuglements et mes erreurs. Mieux vaut avoir tort que de se taire.

2 - Du côté de chez Bel-Ami


Quand je lis Bel-Ami, je ne peux m'empêcher d'y voir une variation superficielle sur le thème du Rouge et le Noir. Là réside probablement la clé de la popularité de Maupassant : n'avoir pas poussé la clairvoyance jusqu'à en devenir inaccessible au plus grand nombre. Car que découvre-t-on, finalement, dans Bel-Ami ? que la presse est un monde corrompu au service des intérêts des politiques et des riches ; que les hommes puissants sont influencés par leur femme ; leur femme par leur vagin ; et que donc, qui veut faire fortune le pourra s'il est assez séduisant pour faire succomber les femmes et assez calculateur pour en jouer. Tout juste de quoi procurer au lecteur la jubilation - le sentiment de puissance - que procure l'illusion d'accéder à un regard lucide, critique et acerbe sur le monde, quand, en réalité, on ne sort jamais des sentiers nous ramenant aux lieux les plus communs, sinon aux préjugés les plus vulgaires. Mais il est vrai que Stendhal avait la conscience, la volonté et l'honnêteté de n'écrire que pour quelques "happy few" - ce qui ne l'a pas empêché de trouver son public.

1 - Mickaël Vendetta et Blaise Pascal


Au fond, il vaudrait mieux être Mickaël Vendetta que Blaise Pascal. Envisagé de l'extérieur, il ne fait aucun doute que Pascal est d'une fréquentation infiniment plus intéressante (Mickaël Vendetta n'est intéressant que comme
symptôme, nullement comme fréquentation), cependant, l'estime de soi dans la bêtise me semble plus saine - plus viable - que la haine du moi dans la lucidité. Bien sûr, il existe une troisième solution - la meilleure : l'affirmation de soi dans la lucidité - dit autrement : la lucidité sans instinct morbide.